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Page:Guèvremont - En pleine terre - paysanneries - trois contes, 1942.djvu/33

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PRIÈRE


La mère Beauchemin plus appesantie par un rude labeur que par l’âge traînait son pas fatigué sur la route. Elle ne répondait pas aux signes d’amitié que lui adressait sa voisine, du fond de la maison en retrait. Bien avant l’heure du mois de Marie elle allait, seule, prier à la croix du chemin, sans remarquer la beauté du jour qui finissait doucement et le blond soleil de mai qui étirait ses derniers rayons sur la plaine du Richelieu.

Dans son jeune temps la première chanson de l’eau, au printemps, l’éclosion d’une fleur, le firmament en feu avaient fait éclater en elle combien d’alléluias. D’année en année, les cris d’allégresse s’étaient affaiblis en un écho si mince qu’elle ne l’entendait plus. Trop de fois le même soleil qui se couchait en fête dépliant avec effet son éventail de couleurs, en signe de beau temps,