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Page:Guèvremont - En pleine terre - paysanneries - trois contes, 1942.djvu/98

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Germaine Guèvremont

filles, ça prenait pas grand’chose pour me faire revirer de bord : un grain de pluie, un petit air de vent, et j’m’en retournais à la maison.

Mathilde Beauchemin, rouge comme une pivoine, s’emporta :

— Modère tes passions, Didace. C’est pas pour rien que, dans tout le canton, tu passes pour un vrai cimetière de réputations.

De toutes parts on questionnait Ludger sur les choses de la navigation :

— Retournes-tu naviguer encore c’t’année ?

— T’as pas l’idée de devenir « pilot » branché ?

— Qui c’est qui aura le « fanot » de l’île-aux-raisins ?

Mais même regaillardi, Ludger demeurait avare de ses paroles. À la fin, il avoua à Didace Beauchemin qu’il avait quelques mots à lui dire à l’écart.

— Quoi c’est que t’as d’étrange à me confier, mon jeune ?

Parler est facile quand on n’a rien à dire ; mais quand un secret d’amour pèse sur l’esprit des garçons, les mots sont aussi durs à