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MARIE-DIDACE

pondre. Les yeux mi-clos, comme une petite chatte, toute à sa vie secrète, l’oreille collée au sol, elle écoutait, par ce midi de juin, sa première musique de la terre. Alentour, une abeille butinait ; des anémones, de la vergerette, et, au fond, des violettes éclataient. Pour Marie-Didace, elles étaient des fleurs éveillées. D’autres, à côté, dormaient encore.

La cane blanche s’approcha, caquetant, le train lourd, imposant. Toujours immaculée et toujours solitaire, son isolement étonnait. Mais pas Marie-Didace qui en savait la raison. La cane blanche ne voulait pas salir ses plumes. De crainte que le secret de sa cachette ne fût révélé par le caquetage, Marie-Didace éloigna la cane.

— Marie-Didace !

La voix, plus aiguë, déchira le silence. Cette fois l’enfant jugea bon de répondre.

— Quoi c’est ?

— Cours vite au bord de l’eau. Va dire à pe-père que le manger est paré à dresser. Et pile pas dans l’ortie.

Marie-Didace s’assit sans hâte. Elle cueillit une anémone et en porta à ses lèvres la coupe minuscule. Une fourmi montait sur son pied. Avant de se lever, tandis que du sable chaud coulait entre ses orteils, elle laissa à l’insecte le temps de se poser à terre. Une fois debout, Marie-Didace partit en courant.