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Page:Guèvremont - Marie-Didace, 1947.djvu/207

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MARIE-DIDACE

— Ça serait ben un vrai crime, protesta l’Acayenne. Une enfant qui a pas encore l’âge de raison.

Marie-Didace se mit à pleurnicher, collée à son grand-père.

— J’y vas pas à l’école. J’y vas pas. J’sais pas lire, pas écrire. J’sais rien faire. Quoi c’est que j’aurai l’air, à l’école ?

— T’apprendras.

— J’ai pas l’âge de raison, me-mère l’a dit. Puis, dans les grosses tempêtes, j’m’écarterai dans la neige.

— Crains pas, je te battrai le chemin s’il le faut. Puis, après la classe, j’irai au-devant de toi. Tu te colleras à ras moi et je te cacherai le vent.

Il s’arrêta :

— Regarde, regarde vite ce qui vole au-dessus de la commune.

Un héron battait l’air de ses grandes ailes. Les pattes verticales, il se posa sur la grève opposée.

— Si t’es bonne fille, continua Didace, après-midi p’t’être ben que je te mènerai voir un nid de sarcelles.

— Où ça ? demanda l’enfant sur un ton de doute et de joie à la fois.

— Vis-à-vis l’Île à la Croix.

Marie-Didace battit des mains. Entre toutes les îles, elle aimait l’Île à la Croix dont la pointe verte