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préface

donné d'y pouvoir mentir à l'aise — mentir effrontément et naïvement, mentir avec attendrissement et délices — à l'ingrate perversité de nos semblables, non moins qu'à l'inéluctable écœurement de nos destinées finales ! À cette heure où le Pessiniisme, (cette religion amère des sacrifices inutilement consommés et du néant douloureusement acquis), est devenu la foi commune des penseurs, et — comme un vaste incendie où s’abîment nos dernières espérances — frappe de ses clairs sanglants les fronts qui dominent ; à cette heure où le réel se manifeste plus décevant que jamais, plus stérile et hideux, sommes-nous pas privilégiés, poëtes paisibles, qui nous réfugions dans l'illusion réconfortante du rêve et les nobles mensonges de l'art ?

— Prophètes décriés d’un art nouveau, grands méconnus de la multitude. Je voudrais vous dire ici que je vous vénère et vous aime ! Grâce à vous, la France a ses chefs-d’œuvre lyriques, enfin, et de récents noms de gloire à inscrire aux murailles de son Panthéon. Dans le cœur des enfants naïfs et des rêveurs adolescents, vos poèmes ont fait éclore l'amour du beau, comme une