Page:Guaita - Rosa mystica, 1885.djvu/25

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
15
préface

de fils intellectuels du poëte se font gloire d’être des « névropathes. »

On le voit : malgré toute mon admiration pour le grand homme, je n'ai garde de voiler la pente périlleuse où aboutissent ses doctrines d’art.

Dans la poésie : Sensualité, M. Jean Moréas rédige, sans s'y conformer, le programme des outranciers du sensationnisme sombrant dans le réalisme absolu[1]

« N’écoute plus l’archet plaintif qui se lamente
« Comme un ramier mourant au fond des boulingrins ;
« Ne tente plus l’essor des rêves pérégrins
« Traînant des ailes d’or dans l’argile infamante !

. . . . . . . . . . . . . . . . . . .

« Viens humer le fumet — et mordre à pleines dents
« À la banalité suave de la vie,
« Et dormir le sommeil de la bête assouvie,
« Dédaigneux des splendeurs des songes transcendants ! »

Baudelaire n'a jamais poussé si avant ses théories matérialistes ; il est mystique jusqu'en la débauche, et ne perd jamais de vue son farouche idéal, lorsqu’il plonge

  1. M, Moréas n’est pas de ceux-là. Son récent recueil, les Syrtes, le place en deçà plutôt qu’au delà de Baudelaire. Ces vers sont d’une forme achevée et d’un sentiment souvent exquis.