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rosa mystica

à l'égoût des plus épouvantables réalités. Ses fantaisies macabres, si riches d’ardente ironie, de myticisme dévoyé et de rousse splendeur démoniaque, sont des pantacles alarmants de la décadence et de la perversité modernes.

L'on affecte de s’indigner ou de ne comprendre pas. On crie sus à l'immoralité, sus au réalisme. — Baudelaire, un réaliste ![1] — Ô sotte engeance prudhommesque aussi prompte au jugement téméraire qu'entêtée à l'erreur manifeste ! Suffisance fétide ! Hargneuse médiocratie régnante éternellement !…

— Lisez « la Charogne ! » (s'exclame-t-on). — Oui certes ! qu'on la lise, cette superbe poésie où la pourriture sert de repoussoir à la plus idéale des apothéoses : à la glorification de l'impérissable amour, en

  1. Dans une lettre (où M. le Marquis de Custine, homme d’esprit et de talent, rend grâces à Baudelaire, pour l’hommage de son livre), on lit, après de discrètes critiques, ces mots déplaisamment insinuatifs : — « Vous voyez, Monsieur, que je ne suis point un « réaliste ! »
    — « Ni moi non plus, » (réplique Baudelaire en une note). « Il « est présumable que M. de Custine qui ne me connaissait pas, mais qui était d’autant plus flatté de mon hommage qu’il se sentait injustement négligé, se sera renseigné auprès de quelque âme charitable, laquelle aura collé à mon nom cette grossière étiquette. » C. B.