Page:Guerne - Les Siècles morts, I, 1890.djvu/101

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les.

Les machines battant les tours, comme la mer,
De leurs chocs réguliers n’ébranlent plus l’enceinte,
Et la grêle des traits ne siffle plus dans l’air.

Mais oubliant le camp et le Perse et l’étreinte,
Exultant dans sa force et ses désirs altiers,
Le cœur de Babilou s’enorgueillit sans crainte.

Dans le silence obscur, parmi les noirs dattiers,
Mêlée aux chants aigus des trompettes joyeuses,
La rumeur de la fête emplit les deux quartiers.

Étrangers et soldats vers les cours spacieuses
Où siègent à leur rang les femmes aux yeux peints,
Courent, la lèvre sèche, en troupes furieuses.

Et tous, offrant des fruits, des poissons ou des pains,
Aux bras voluptueux des brunes courtisanes,
S’enfoncent tour à tour dans l’ombre des grands pins.

Les esclaves, au bruit des cymbales profanes,
Vêtus de pourpre abjecte, enivrés et meurtris,
Le bâton dans la main, vont assis sur des ânes.

Et le Roi, tout au fond du palais, loin des cris,
Trônant environné d’eunuques et de sages,
Boit le vin de palmier dans des brocs d’or fleuris.