Page:Guerne - Les Siècles morts, I, 1890.djvu/132

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J’étais l’Œil du palais, la Prunelle du Maître,
Le Pasteur vigilant et fort qui faisait paître
Sur le sol du Figuier le troupeau des vivants.
Scribes et messagers, prophètes et savants,
Contrôleurs préposés sur des métiers sans nombre,
Silencieusement pullulaient dans mon ombre.
La Sagesse divine et la bonté du Roi,
Sa gloire et sa splendeur se reflétaient en moi
Comme un ciel étoilé dans un étang limpide.

Puis livrant aux dangers ma jeunesse intrépide
Et perçant de mes traits les cavaliers Khétas
Que les luisantes faux abattaient par grands tas,
Dans la poussière éparse au vol des chars de guerre,
Auprès de Râ-mes-sou j’ai combattu naguère.
J’ai vu le Roi bondir comme un lion puissant,
Le casque d’or au front, terrible et brandissant
L’éclatante harpe que la pourpre ensanglante,
Dans les champs belliqueux hâter la mort trop lente
Et, seul devant les siens, contre les chars rivaux
D’un invincible bras pousser ses deux chevaux,
Victoire à Pi-Amen et Noura satisfaite.
O joyeuses clameurs ! Chants d’ivresse et de fête !
Frisson respectueux de la foule, expirant,
Comme un flot sur la rive, aux pieds du conquérant !
O retour triomphal après les grandes luttes,
Au bruit retentissant des cymbales, des flûtes
Et des trompes d’airain et des tambours de peaux !
O tributs de parfums et d’or ! ô longs troupeaux