Page:Guerne - Les Siècles morts, I, 1890.djvu/150

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Pourquoi dérobe-t-il, comme une injuste proie,
Mes filles, mes troupeaux, mes Dieux et mes trésors,
Puisque pour son départ j’aurais fait, dans la joie
Ronfler les tambourins et chanter les kinnors ?

Ton Élohim te garde ; et moi, contre ta vie,
Protégé d’Iahvé, je n’accomplirai rien.
Mais j’ouvrirai ta tente où ma force ravie,
Mes Therafim volés gisent parmi ton bien. —

Iaqob répondit : — Qui m’insulte et m’opprime,
Et contre mon Seigneur quelle est ma trahison ?
Mon âme est un ruisseau que ne souille aucun crime ;
La part de l’étranger n’est pas dans ma maison.

La ronce du désert a mordu mes chevilles
Et l’épine sanglante a déchiré ma peau.
Près de toi j’ai servi quatorze ans pour tes filles :
J’ai servi près de toi six ans pour le troupeau.

Combien as-tu perdu d’agneaux dans ta pâture
Et parmi tes brebis compté d’avortements ?
Ai-je égaré tes boucs ou, pour ma nourriture,
Fait rôtir tes béliers sur trois cailloux fumants ?

J’emporte mon salaire, et, si ma tente est pleine,
Aucun Dieu de Laban n’est caché dans mon sac.
Le labeur de mes mains, le profit de ma peine
Sont pesés justement par le Dieu d’Içehaq. —