Et ses membres semblaient, gonflés d’ardente sève,
Des dattiers, lourds de fruits, que l’été dore et crève.
Salut ! ô jour nouveau ! Soleil ! Ciel retrouvé !
Printemps, qui balançais sur l’Amant conservé
Les parfums rajeunis des floraisons précoces !
Baisers inoubliés des fugitives noces,
Ô baisers de Douzi que les divins palmiers
Au jardin solitaire ont cachés les premiers,
Salut ! Le Rejeton, dans sa grâce éphémère,
Tendait ses faibles bras vers le cœur de sa mère ;
Et moi, comme une épouse ayant baisé ses yeux,
Je l’emportai vivant dans le ciel des Grands Dieux.
Les mois sont revenus. L’antique destinée
A refermé sur toi le cercle de l’année.
Voici l’heure, ô Douzi ! Le vent froid des sommets
Mord tes membres glacés et roidis désormais.
Le flot précipité de tes blessures neuves
D’une sanglante écume empourpre l’eau des fleuves ;
L’écorce des Pays est un champ dévasté
Et la terre muette, en sa stérilité,
Te pleure, ô Printanier, qui disparais encore !
Pleurez ! la nuit s’amasse et n’aura plus d’aurore !
Pleurez, Esprits des Dieux, vous qui me reverrez
Heurter au mur de fer mes bras désespérés !
Pleurez, Esprits des Dieux ! De mes mains suppliantes
Je briserai la coupe, et de pierres voyantes
Je remplirai le creux de mes genoux meurtris.
Seigneurs, souvenez-vous ! Souvenez-vous, Esprits !
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LA LAMENTATION D’IŠTAR