Esprits des profondeurs, Esprits des sombres portes,
Esprits qui dispersez avec les races mortes
La cendre des vivants dans d’éternels remous,
Esprits, recevez-moi quand je reviens vers vous !
Non ! Je vaincrai l’Abîme. Au Mois de mon Message,
Namtar ne suivra plus mon douloureux passage,
Comme un chien sur la trace, aux pleurs de mon effroi.
C’est Ištar qui t’appelle, ô Douzi ! Souviens-toi !
Douzi ! Douzi ! Douzi ! Fils et Pasteur unique,
Quel sort interrogé, quel mot talismanique,
Quel nombre rouvrira l’abîme où tu descends ?
Quelle imprécation vers les Dieux impuissants
Te fera refleurir sur les vertes collines,
Comme un acacia, séché dans ses racines,
Que baigne et rafraîchit l’eau des canaux lâchés ?
Ô lèvres de l’Epoux ! ô membres arrachés !
Ô déluge de sang, intarissable pluie
Qu’aux flancs du Bien-aimé ma chevelure essuie !
Ô restes abattus de sa virilité,
Epieu fécondateur, glaive de volupté,
Qui naguère, aux saisons des célestes semailles,
Plus dur qu’un soc d’airain, labourais mes entrailles !
Ô Taureau mugissant, réveille-toi ! Bondis
Hors du funèbre enclos, sur les bords arrondis
De l’Abîme natal où monte et se révèle
Le Soleil printanier de ta vigueur nouvelle !
À la voix des pleureurs, au bruit de mes sanglots,
Ressuscite, ô Douzi ! Rallume en tes yeux clos.
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LES SIÈCLES MORTS