Page:Guerne - Les Siècles morts, II, 1893.djvu/30

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Érige au grand soleil, sous le ciel pacifique,
La royale splendeur des palais désertés,
Et des temples secrets et des toits abrités
De poutres de palmiers, recouvertes de terre.
Comme un gardien, posté sur un mont solitaire
Que ceint d’un flot profond le fleuve au large cours,
La citadelle au loin dresse ses vieilles tours,
Ses créneaux réguliers, ses bastions de briques
Et les sombres parois de ses murs symétriques.
Alentour, dans les champs, croissent les blés dorés ;
Les arbres savoureux offrent leurs fruits pourprés
Et la vigne nouvelle enlace au long des pentes
Le flexible réseau de ses branches grimpantes.

C’est là. Comme un berger, à l’heure du repos,
Dans les prés verdoyants assemble ses troupeaux,
Tel, près des belles eaux, dans la plaine embaumée,
Alexandre vainqueur réunit son armée.
Le camp bariolé, plein de foule et de bruit,
Jusqu’aux monts Susiens, à l’horizon qui fuit,
Aligne ses enclos, ses fossés et ses tentes,
Où, mêlés aux reflets des armes éclatantes,
Pendent de lourds colliers aux feux éblouissants,
Et des vêtements teints et des tapis persans.
La multitude va, se presse, lutte et passe ;
Comme un grondement sourd, s’élèvent dans l’espace
Les cris intermittents des animaux parqués,
Braiments stridents et longs des ânes efflanqués,
Barrits des éléphants, hennissements sonores