Page:Guerne - Les Siècles morts, II, 1893.djvu/29

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Sur la terre barbare oubliés sans tombeaux,
Ne reverront jamais, privés de funérailles,
De la haute Pella resplendir les murailles !
Le sang noir a jailli sous les casques percés,
Et FEuphrate et l’Indos et les fleuves glacés
Ont dans leurs flots épais, striés d’herbes légères,
Roulé des corps meurtris vers des mers étrangères.

Mais le cruel Arès hurle et bondit en vain,
Et les jours sont venus pour le Héros divin
De maîtriser l’essor des rapides Victoires.
La mer tumultueuse a rendu les nefs noires
Que Néarque, sous l’œil des astres décevants,
Guida, malgré l’hiver, les écueils et les vents,
Des rivages de l’Inde au port lointain de Suse.

Alexandre le voit. Dans la cité confuse
Montent les cris de joie et les appels nombreux
Des compagnons de guerre, interrogeant entre eux
Ceux qui, blêmes encor des douleurs anciennes,
Disent l’effroi nouveau des luttes Indiennes,
Les étranges combats où des Rois triomphants
Apparaissaient debout sur de grands éléphants,
Les marches, le départ, le froid, la frénésie
Des soldats affamés, perdus en Gédrosie,
Et le trop lent retour et les derniers efforts,
Et les tombeaux pieux, bâtis aux guerriers morts.

La ville hospitalière, immense et magnifique,