Page:Guerne - Les Siècles morts, II, 1893.djvu/69

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Jusqu’à l’autre horizon fuit sous les colonnades.
Alexandrie entière est là. Loin des faubourgs,
Au bruit de l’aigre flûte ou des ronflants tambours,
Juifs au sombre manteau, délaissant les négoces,
Égyptiens pensifs, s’appuyant sur leurs crosses,
Et marchant dans la foule avec la gravité
Des ancêtres, debout sur un tombeau sculpté,
Esclaves, étrangers, toute la populace
Monte, reflue et court vers la ville et la place,
Où le trône royal, splendide et vide encor,
Étincelle au sommet de douze degrés d’or.

Sur des chaises d’airain, de pourpre revêtues,
Par groupes adossés aux socles des statues,
Dans l’hémicycle blanc se croisant tour à tour,
Les Savants du Musée attendent à l’entour.
Sages, grammairiens, philosophes, poètes,
D’un doigt sévère et prompt polissant leurs tablettes,
Méditant la lecture ou le discours flatteur,
Devant les grands rivaux courbent avec lenteur
Leurs fronts ceints du laurier pieux. Tel Kallimaque,
Qu’a nourri de son miel la Muse élégiaque,
S’avance, vénérable, auguste et glorieux
De l’âge séculaire accordé par les Dieux.
Tel Théocrite, qui de la flûte docile
Conduit les chants légers des pasteurs de Sicile ;
Et grave auprès de lui, la règle en main, Konon
Qui des astres nombreux sait le cours et le nom.
Tel Aratos, cher hôte, et tel Ératosthène