Page:Guerne - Les Siècles morts, III, 1897.djvu/112

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un juge et comme un vengeur, le vieil Adam, type de l’homme toujours semblable à lui-même dans tous les temps et sous tous les cieux, symbole auguste de l’humanité tout entière qui libre, transfigurée, s’élance vers de nouvelles destinées, mais surtout, hélas ! vers de nouvelles douleurs et de plus amères désillusions.

Ainsi sont terminés ces volumes consacrés au cycle des religions antiques. Elles vinrent de l’Orient ; elles y retourneront peut-être. C’est peut-être vers une Jérusalem nouvelle que se tourneront un jour les âmes désabusées. Sera-ce la Jérusalem prédite par les Prophètes ? Ne le croyons pas ; elle n’est point de ce monde. L’Histoire, religieuse ou politique, n’est qu’un perpétuel recommencement ; ce qui fut sera encore tant que l’humanité souffrante traînera sous le soleil son ignorance désespérée.

Le mystère est éternel et les religions ne furent que des baumes salutaires distillés sur la blessure incurable des âmes. Toutes possédèrent une part de vérité relative, appropriée aux temps et aux circonstances, et les plus grossières comme les plus idéales comptèrent des fidèles et souvent des martyrs. Mais les mythes et les cultes ne naissent pas spontanément ; ils s’engendrent les uns les autres, se transforment et s’épurent sans cesse. Ce qui nous apparaît, dans le reculement des siècles, comme la création d’une race, est un héritage quelle tient d’ancêtres ignorés. Quelles peuplades, errant sur les sommets neigeux de l’Asie, au bord des fleuves ou des mers retentissantes, saluèrent d’abord le soleil bienfaisant et les eaux fécondantes ? Quels hymnes vagues de terreur ou de gratitude hésitèrent sur les lèvres des hommes jusqu’à