Page:Guerne - Les Siècles morts, III, 1897.djvu/126

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
10
LES SIÈCLES MORTS

Par toi, le Démiurge actif, essentiel,
Conscient, pétrissant la matière asservie,
Faisant germer le monde et l’âme et le grand ciel,
Du sensible Univers réalisa l’idée.
Toute œuvre manifeste, à l’imparfait contour,
Par la conception du type est précédée ;
Mais l’ouvrier nouveau sait que son rêve, un jour,
Emané de l’esprit, doit fleurir dans la forme.
Ton rêve, ô Créateur ! conçu dans l’infini,
Dans le fini s’affirme et croît selon la Norme,
Vers le Premier Parfait avec l’Un réuni.
Salut, ô Fin suprême, où se perd la nature !
Où l’âme humaine tend comme vers le soleil
La plante prisonnière en une grotte obscure !
L’Esprit aspire au Bien, mais, hélas ! est pareil
À l’aiglon faible encor dont l’aile est impuissante.
Il hésite, il s’élance, il tombe. Il faut qu’il sente
Ta sage Providence éparse autour de lui.
Ô Dieu ! loin du fragile et loin de la matière,
Sois vers le Beau divin son guide et son appui !
Que par l’amour, l’effort, la vertu, la prière,
Sur l’aile du Désir l’âme s’élève aux Dieux !
Des Dieux intelligents la prière est l’amie ;
Par elle, fibre enfin, l’âme heureuse, affermie,
S’affranchit et s’absorbe en ton sein radieux,
Ô Principe ! et mêlée aux célestes Pléiades,
Comme un astre au zénith montant vers l’Unité,
Dans l’Absolu parfait conçoit les trois monades
Divines : Vérité, Symétrie et Beauté.