Page:Guerne - Les Siècles morts, III, 1897.djvu/158

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Tel parlait ton apôtre et, faible, sans défense,
J’ai volé vers un ciel qu’il entr’ouvrait pour moi
Et mon cœur a nourri ta sublime démence,

Galiléen ! Mon sang a cimenté ma foi ;
Et, pour t'appartenir intacte et tout entière,
Au désert d’Orient j’ai vécu sans effroi.

J’ai de mes longs cheveux balayé la poussière,
Du fouet armé de clous j’ai lacéré mes flancs
Et des pleurs pénitents ont rougi ma paupière.

Et tout cela, Jésus ! larmes et bras sanglants
Éperdument levés vers un espoir suprême,
Jeûnes, terreurs des nuits sombres, soleils brûlants,

Holocauste du cœur qui s’immole lui-même,
Tout cela, tout cela, Jésus ! ne fut donc rien
Qu’un songe d’épouvante où passe un spectre blême !

Dieu nouveau, rédempteur promis au siècle ancien,
Du haut de ton azur la chute est plus profonde !
Dieu que j’avais rêvé, tu n’étais pas le mien !

Toujours le vieux péché souffle une haleine immonde ;
Toujours le cep maudit porte son fruit amer,
Et l’incurable lèpre use le flanc du monde.