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LA DESCENTE AUX ENFERS

C’est moi qu’avaient nommé les sages anxieux
Lorsque, sur les débris des idoles d’argile,
Leur rêve inassouvi pressentait l’Évangile.
Et les temps sont venus et le Sauveur est né.
Du faite de ma croix le sang que j’ai saigné
Intarissablement coule, comme une eau pure,
Pour effacer la faute et laver la souillure.
Trahi, crucifié, mourant, je suis vainqueur,
Je règne. Et le pardon ruisselle de mon cœur.
De l’enfer et du mal je clos les sombres fastes ;
Venez ! Mes bras divins, peuples, sont assez vastes
Pour vous embrasser tous, mes fils ! et contenir
Avec tout le passé tout l’immense avenir.
Je suis le moissonneur ; ô morts ! soyez la gerbe
Qu’au Père universel présente enfin le Verbe.
Ainsi qu’après trois jours, libre et vivant, je sors
Du tombeau, de l’enfer évadez-vous, ô morts,
Vers l’unique beauté qui brille et vous convie,
Et montez avec moi dans la gloire et la vie,
Ô souffrants, ô martyrs, ô damnés, mes élus ! —

Et, l’Ange ayant touché mes yeux, je ne vis plus,
Dans un lointain d’azur et de pourpres flottantes,
Qu’un escalier géant aux marches éclatantes
Qui montait de l’abîme et jusqu’au firmament
Érigeait ses degrés d’or et de diamant.
Et sur les blocs taillés et sur la balustrade
Une splendeur liquide, épandue en cascade,
Comme un torrent léger, à la base écumait.