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LES SIÈCLES MORTS

Ainsi transfigurés, majestueux, candides,
Par les enfers vaincus et maintenant splendides,
Ô maîtres, ô pasteurs des peuples fabuleux,
Qui paissiez les esprits sur les monts merveilleux,
Vous les guidez encor vers la cime prochaine !
L’universel Sauveur a rompu toute chaîne ;
Et voici qu’avec Lui, dans les libres sillons
L’immense Humanité monte. Par millions
Et s’accroissant toujours, l’innombrable famille
Aux portes de l’enfer tourbillonne et fourmille
Ainsi qu’aux frais matins les oiseaux familiers
Que rassemble l’automne aux toits hospitaliers.


VI



Alors dans le silence et la paix infinie
Une haute, ineffable et céleste harmonie
Vibra. Jésus parlait. Sa forte et calme voix
Était comme ce vent très lointain, qui parfois.
À rugi sur la mer, puis s’apaise, murmure,
Soupire dans les joncs et meurt dans la ramure :
— Je suis l’espoir tardif des âges chancelants,
L’enfant miraculeux qu’ont porté dans leurs flancs
Les races de la terre et les siècles du monde.
Je suis l’astre attendu dont la lumière inonde
Les gouffres de la mort et les hauteurs des cieux.