Page:Guerne - Les Siècles morts, III, 1897.djvu/265

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Resplendir la clef d’or d’un plus vaste horizon :
Rien ! l’ombre plus compacte égara ma raison.
Et quand, brisé par l’âge et vaincu par la haine,
Comme un guerrier blessé qui tombe dans l’arène,
J’ai fermé pour mourir mes yeux épouvantés,
Quand, résigné, tremblant, sourd aux cris révoltés,
J’ai cherché le repos dans un oubli sans borne,
Quel souffle doux et pur a traversé l’air morne ?.
Quels pitoyables Dieux ont rallumé pour moi
L’espérance native et l’amour et la foi ?
Lequel a consolé mon âpre solitude ?
Si j’ai trouvé la paix, c’est dans ma lassitude.

Je suis las de marcher vers un but qui me fuit,
Ainsi qu’un voyageur qui, perdu dans la nuit,
Au travers du chemin se couchant dans la vase,
N’attend qu’un char tardif qui passe et qui l’écrase.
Oui, je suis las de vivre, et le fardeau divin
Depuis trop longtemps pèse et m’accable à la fin.
Je suis las et sans force et tel qu’un vieux navire,
Rompu, battu des flots, qui dérive et chavire.
Trop longtemps j’ai souffert et vu l’œuvre des Dieux
S’épanouir sur nous en forfaits odieux ;
Trop longtemps j’ai compté leurs sombres dynasties,
Au fond des souterrains ou des temples blotties,
S’abritant sous l’effroi comme sous un rempart.
Dieu succédant à l’autre et lui volant sa part,
L’horrible après l’obscur, l’infâme après l’obscène,
Et le vindicatif repu de chair malsaine