Page:Guerne - Les Siècles morts, III, 1897.djvu/269

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Alors, les Dieux couchés dans leur linceul d’écume,
L’Homme immortel vit poindre au travers de la brume
Une lueur douteuse, encor pâle et traînant
Un lambeau de clarté dans le ciel frissonnant,
Comme un reflet de jour sous une porte basse.
Alors l’Homme comprit et, jetant dans l’espace
Une clameur d’ivresse et d’espoir indompté,
Cria vers l’Avenir et vers la Liberté.
Et voici que germa dans sa prunelle avide.,
La terre étant vengée et le ciel étant vide,
L’auguste vision d’un nouvel univers,
Radieux, fraternel, ayant brisé ses fers
Et d’un essor égal, puissant et pacifique,
Hâtant vers le bonheur son destin magnifique.

Et par-dessus la nuit, sur le plus haut gradin
Des monts, illuminés par un rayon soudain,
L’orbe du vieux soleil jaillit dans l’étendue.
Et l’astre, sous un dais de pourpre suspendue,
Bienfaisant et sacré, splendide et rajeuni.
Comme un roi glorieux monta dans l’infini,
Si pur qu’en revoyant sa flamme immaculée
La Terre fut joyeuse et mourut consolée ;
Tandis que, renaissant au baiser du soleil,
Adam transfiguré, tel qu’au premier éveil,
Enfermant en son cœur l’Espérance éternelle,
Bondissait vers l’aurore et s’abîmait en elle.