Page:Guerne - Les Siècles morts, III, 1897.djvu/39

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Disaient : — Hélas ! la voix du Très-Sage est pour nous
Dont la raison psychique hésite, erre et défaille,
Comme l’herbe marine aux mulets et la paille
Aux poissons. L’ignorance égare nos esprits
Et ton Verbe, Seigneur, Seigneur, est incompris ! —

Le sacrifice ardent et la flamme embaumée
Brillaient encor. La nuit s’empourprait. La fumée
Montait légère et droite aux cieux inaperçus,
Lorsque de la nuée entr’ouverte, au-dessus
Du brasier, une forme étrange et taciturne
Émergea, pâle et morne, en sa robe nocturne.
Un diadème obscur ceignait ses cheveux longs ;
Une chaîne brisée enserrait ses talons,
Tandis que sur sa tête, où la clarté persiste,
D’un astre éteint jadis tremblait le reflet triste.
Son œil réfléchissait comme un changeant miroir
L’espérance joyeuse et l’amer désespoir.
Tour à tour émanaient de ce spectre de femme
L’immuable Lumière ou la matière infâme,
Et dans sa voix lointaine hésitaient tour à tour
La crainte et la pitié, le désir et l’amour :

— Abîme ! ô Propatôr ! ô Père ! entends mes plaintes !
O première Pensée, Emanations saintes,
O Nous, Alétheia, Logos, Zoè, salut !
O couples successifs où l’Unité se plut
A déployer sans fin ses longues énergies,
Intelligence enclose au sein des Syzygies,