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Page:Guerne - Les Siècles morts, III, 1897.djvu/8

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LES SIÈCLES MORTS

Et la muraille est rouge, informe ; et par-dessus
Des veilleurs se penchaient qui regardaient Jésus
Et, comme des signaux, lançaient de gouffre en gouffre
Des jets de flamme verte et des vapeurs de soufre.
Et derrière le mur montaient de rauques voix,
Haletantes de rage et grondant à la fois ;
Et l’une, plus amère et plus désespérée,
Hurlait : — Fermez la porte et tenez-la barrée ! —
Et grinçant sur les gonds, les battants sourdement
Se fermèrent avec le vaste ébranlement
Que feraient sous les cieux deux montagnes voisines
Qui joindraient leurs rochers, souderaient leurs ravines.
Et voici qu’une voix triomphale, à son tour,
Répondit dans l’espace : — Arrachez de la tour
Et chassez des créneaux les pâles sentinelles,
Princes ! Élevez-vous, ô Portes éternelles,
Pour que le Roi de gloire entre et soit adoré ! —
Et je vis chanceler le mur démesuré
Et, comme un sang qui fuit de récentes blessures,
D’épais ruisseaux de feu couler des embrasures
Et s’ouvrir le rempart, et les portes de fer
Tombée, et dans la nuit flamboyer tout l’enfer.


III



L’enfer ! Et je fermai ma prunelle hagarde.
Et l’implacable Esprit me dit : — Viens et regarde !