Page:Guerne - Les Siècles morts, III, 1897.djvu/85

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Il attend, il soupire, il invoque, il espère
L’oubli du grand blasphème à l’unité du Père.
Il veut, dans sa justice et dans sa liberté,
Voir la perfection dans la Divinité
Et, du dogme maudit balayant l’imposture,
Ne plus prostituer vers une créature
L’encens religieux qu’aspire un Dieu jaloux.

La foi, comme la mer, a de vastes remous ;
La conscience humaine y flotte a la dérive.
Toute croyance est vraie avant qu’on la proscrive ;
Proscrite, elle grandit dans le sang des martyrs.
Oh ! combien de remords, combien de repentirs
Ont vainement pansé d’irréparables plaies ?
Héros, mages, songeurs, cadavres sur des claies,
Combien par leur trépas ont du bûcher fatal
Fait un impérissable et sacré piédestal ?
Le douteux avenir est le vengeur suprême ;
Ce que hait aujourd’hui, demain l’acclame et l’aime.
Comme Moïse enfant sur le Nil ballotté,
Dans son berceau flottant vagit la Vérité.
On condamne, on absout, on affirme, on discute :
Qu’importe ? Sur les monts l’aigle suspend sa chute :
Qu’importe ? L’esprit vole et l’univers poursuit
Sa rude ascension dans l’orage et la nuit. —

Il se tait. Arius, farouche, se recueille.
Comme un vent qui s’éloigne agite encor la feuille,
De sa lèvre crispée un dernier râlement