Page:Guerne - Les Siècles morts, III, 1897.djvu/93

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L’ombre est éblouissante et l’espace est sans voiles ;
La profondeur en fête allume ses palais,
Tandis qu’en se croisant de fuyantes étoiles
Embrasent tout l’azur d’incandescents reflets.

Alors, en cet instant où, prête à fuir comme elles,
Ton âme illuminée entre au firmament bleu,
O Julien ! pensif et résigné, tu mêles
Aux souffles de la nuit un grave et lent adieu ;

Adieu que rien n’attriste, adieu d’un sage antique,
Adieu que, déjà libre au sein de la Beauté,
Tu jettes du sommet de ta raison mystique,
Toi le Maître du monde, au monde enfin quitté :

— Esprits de l’Univers, ô bienveillants Génies,
Soleil, Roi lumineux, Lune, Astres immortels,
Dieux, dont je réveillai les saintes agonies,
Je salue en mourant vos chancelants autels !

Je pars ; je vais là-bas suivre vos beaux cortèges,
Déesses ! Mère auguste, ô toi qu’indolemment
Des lions chevelus traînaient, parmi les neiges,
A travers les pins noirs, vers l’inutile Amant !

Hermès, inspirateur des paroles certaines,
Zeus, principe de tout, Apollon, Roi vermeil
Des Muses que nourrit la maternelle Athènes,
Planez, ô Dieux, planez sur mon dernier sommeil !