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Panorama des microsystèmes pour le vivant

Réduction des dimensions

Intérêts de la miniaturisation

Économie de réactifs et de temps. Les potentialités des dispositifs d’analyse miniaturisés sont généralement présentées dans la littérature comme une petite révolution [10], [11], [12], [13]. Des dispositifs miniaturisés impliquent des volumes plus faibles, des distances plus courtes. Ainsi, on n’utilise que de faibles volumes d’échantillons et de réactifs, qui peuvent être rares ou coûteux [14]. Lion et al. passent en revue les implications de la miniaturisation dans le cadre de l’analyse des protéines (par:analytical-triangle); ils proposent trois principaux indicateurs visant à déterminer si un dispositif miniaturisé est plus avantageux : les performances, la quantité d’échantillon nécessaire et le temps d’analyse [15] ; la miniaturisation n’est d’ailleurs pas obligatoirement la meilleure solution dans tous les cas.

Gain en performances. Dans les analyses de séparation, la théorie prévoit une plus grande efficacité [10], notamment en électrophorèse capillaire [11]. Des canaux miniaturisés réduisent les distances de diffusions moléculaire et thermique. Le temps de diffusion sur une distance varie comme l’inverse du carré de la distance  : s’il faut 17 minutes à une espèce pour diffuser sur 1 mm, il ne lui faut que 100 ms pour diffuser sur 10 µm [16]; en réduisant le libre parcours moyen des espèces, on favorise également les réactions [13]. À titre d’exemple, l’analyse d’un échantillon de sérum humain par chromatographie liquide et spectrométrie de masse a été réalisée en puce et en capillaire par Horvatovich et al. : le dispositif sur puce a une résolution double pour un volume d’échantillon consommé trente fois inférieur [17].

Intégration sur puce et diminution des coûts. La miniaturisation des systèmes d’analyse vise également le regroupement de plusieurs fonctions sur le même support, voire des chaînes complètes d’analyse (§ ). En regroupant les fonctions, la connectique est simplifiée, les canaux sont réduits et les volumes morts minimisés. Les systèmes fabriqués, en étant miniaturisés, sont beaucoup plus portables ; cette caractéristique est particulièrement intéressante, que ce soit pour le diagnostic à domicile ou les urgences sanitaires à grande échelle, dans des zones avec peu d’infrastructures médicales [6]. Par ailleurs, l’intégration de systèmes miniaturisés d’analyse sur puce permet de profiter des mêmes avantages que la fabrication en masse de la micro-électronique (very large scale integration, vlsi) : la fabrication à grande échelle assure une excellente reproductibilité et des coûts limités. La reproductibilité est nécessaire à l’utilisation de dispositifs de façon hautement parallélisée pour du criblage haut-débit [18]. La baisse des coûts de fabrication permet d’envisager des dispositifs jetables, à utilisation unique, supprimant par la même occasion les problèmes de contamination croisée.

Défis et verrous

Réduction d’échelle. La miniaturisation des systèmes d’analyse chimique et biologique est porteuse d’autant de potentialités d’applications que de défis technologiques et scientifiques à relever. En effet, la réduction d’échelle (downscaling) rend nécessaire la prise en compte de nombreux effets physiques et chimiques lors de la conception. Il ne suffit pas de réduire homothétiquement les dimensions des dispositifs macroscopiques [13]. Il est également important de se poser la question de l’influence de la réduction des dimensions sur les différents modes de détection chimique et biologique [19].

Prépondérance des surfaces. La miniaturisation des dispositifs d’analyse entraîne une forte augmentation du rapport surface-sur-volume. Elle favorise par exemple l’adsorption des analytes sur les parois [20] et l’évaporation des liquides, en particuliers des gouttes [19] ; dans le domaine des biopuces, le glycérol est utilisé pour limiter cet effet. L’influence des surfaces devient prépondérante ; il est nécessaire de contrôler précisément les divers phénomènes physiques et chimiques qui s’y déroulent. La fonctionnalisation chimique de surface a donc une importance cruciale dans la miniaturisation des systèmes d’analyse.

Fluidique. La miniaturisation permet de réduire le temps de diffusion, mais elle entraîne également des écoulements laminaires qui ne favorisent pas le mélange (\S (par:microfluidique)). Il est donc nécessaire de développer de nouvelles approches pour mélanger les fluides dans les microsystèmes. La connexion du microsystème avec le monde extérieur est également un défi que je détaillerai plus loin. La « barrière du microlitre » correspond à l’ensemble des problèmes engendrés par la dispense et la manipulation de volumes de liquides inférieurs au microlitre [18], [21], [22].

Interdisciplinarité

Perspective historique. Interdisciplinarité et recherche scientifique ont longtemps été liées. Aristote est à l’origine des principales subdivisions de la connaissance ; non seulement il étudie l’ensemble des disciplines possibles, mais il y participe activement et influence notablement la plupart d’entre elles [23]. D’autres polymathes marquent l’histoire de la connaissance : Léonard de Vinci, Galilée, Thomas Young, etc. Ces « hommes d’esprit universels » étudient et excellent dans plusieurs disciplines différentes. Cependant, avec l’évolution des sciences et des techniques, la somme des connaissances augmente de façon telle que les scientifiques sont de moins en moins capables de maîtriser autant de domaines de compétences. Au xxe siècle, l’interdisciplinarité n’est plus que rarement présente dans la recherche scientifique. On ne rencontre alors le concept de façon régulière que dans le domaine de la santé, où il fait généralement référence