Page:Guillaume d’Orange, le marquis au court nez (trad. Jonckbloet).djvu/227

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
224

V.


Guichardet


Cependant Guichardet était resté à Orange, affligé du sort de son frère et encore plus de ce qu’on l’empêchait de partir. Il courut vers Guibor et se jetant à ses pieds, lui dit :

— Noble comtesse, au nom de Dieu, armez-moi chevalier, comme je l’ai désiré depuis longtemps, afin que je puisse aller secourir mon frère.

— Du tout, mon cher, tu n’iras pas ; mon bon seigneur l’a expressément défendu.

Et elle recommanda sur ses yeux à son gouverneur de veiller à ce que le jeune homme ne s’éloignât pas.

— Il y a bien de quoi enrager, se dit Guichardet ; je suis assez grand pour porter une armure ; on a le droit de me mépriser si je reste.

Il sortit de sa chambre sans avertir personne et se dirigea vers les écuries, où il prit un cheval fort et vif, qui n’avait pas son pareil. Il le sella, y monta et sortit de la ville le plus vite possible, pour rejoindre l’armée.

Bientôt la nouvelle en arriva à Guibor ; pleine de colère elle fit crier par la ville que chacun eût à courir après le jeune homme pour le ramener. Bon nombre d’écuyers légers se mirent à sa poursuite ; mais leurs cris n’y firent rien. Il n’y eut que la promesse de son gouverneur, que Guibor le fera chevalier, qui parvint à le faire revenir.

Dame Guibor fut obligée de lui donner des armes. Sous l’ombrage d’un grand arbre, elle lui fit vêtir le haubert et lacer le heaume ; puis elle lui ceignit elle-même l’épée au flanc gauche.

Lorsqu’il fut armé selon ses désirs, Guichardet retourna