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par terre. Puis tirant l’épée qu’il avait arrachée au Sarrasin, il fit voler la tête à un paien, fendit le crâne à un second, et renversa deux autres.

L’ennemi s’épouvanta et se dit :

— C’est Aarofle qui vient prendre et détruire Orange ; nous avons excité son courroux parce que nous n’avons pas combattu en Aleschant-sur-mer, et il paraît qu’il veut nous en punir.

Ils se mettent à fuir pour sauver leur vie, sans s’occuper de leurs prisonniers. Le comte Guillaume poursuit, l’épée haute, les fuyards, à qui la peur donne des ailes.

Alors Guibor se mit à pleurer et cria si haut qu’elle put :

— Venez, beau sire, maintenant vous pouvez entrer.

À ces mots Guillaume revient sur ses pas ; il galope vers les prisonniers, les délivre l’un après l’autre de leurs liens, et les dirige sur Orange. Ensuite il retourne à toute bride aux ennemis ; en quatre coups il en met six par terre, et les apostrophant en leur langue, il leur crie :

— Mauvais bâtards, vous me laisserez vos chevaux que je donnerai à mon oncle Desramé, qui vous jettera tous en prison pour lui avoir failli en la bataille.

— Comme vous l’ordonnez, monseigneur, dirent les païens, Et descendant de cheval ils se lièrent les poings entr’eux, de manière qu’il n’en resta que quatre de libres, qui sur l’ordre de Guillaume, dirigèrent les autres sur Orange.

— Seigneur ! dit Guibor, il faut que Guillaume soit protégé par une fée, pour faire prisonniers tant d’ennemis à lui seul. Mais Sainte Marie ! secourez-le, car je vois les hauteurs se couvrir de païens. Hélas ! malheureuse ! que faire ? S’il succombe sous le nombre, c’est par ma folie.

Elle se mit à crier de toutes ses forces :

— Hâtez-vous, monseigneur ! Ah ! Guillaume, noble marquis au court nez, par l’amour de Dieu, ne vous occupez plus de ces Turcs à qui vous avez fait assez de mal. Que le diable les emporte !