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neur ! un cheval la porterait à peine. Déjà il a occis vingt mille des nôtres ; à chaque coup il fait tomber dix hommes d’armes. Par Mahomet ! Sire, sauvez-vous et gardez-vous de le rencontrer.

— Tais-toi, lâche poltron, répartit Bauduc. Par Mahomet à qui je me suis voué ! si je puis l’atteindre, lui ou Guillaume au court nez, je les présenterai à Desramé, morts ou prisonniers, pour qu’il en fasse son bon plaisir. Je ne donnerais pas deux deniers de quatorze de leurs pareils, aussi longtemps que je tiendrai mon maillet de fer ; je les tuerais tous d’un seul coup.

En ce moment encore Bauduc peut dire tout ce qui lui passe par la tête ; mais avant que le soleil soit couché, Renouard lui aura prouvé quel homme il est.

Cependant le géant a traversé les bataillons épais de l’ennemi, en semant la mort dans leurs rangs, il ne s’arrête qu’au bord de la mer, auprès de leurs navires.

Le combat s’y poursuit avec une ardeur incomparable. Renouard veut détruire leurs vaisseaux. Plongeant sa perche dans les flots, il s’en sert comme d’un brin d’estoc pour sauter à bord d’un vaisseau éloigné de plus de vingt cinq pieds du rivage. C’était là qu’on retenait prisonniers Bertrand, Guibelin, Guichard-le-renommé, Gaudin-le-brun, Hunaut, Gautier de Termes et Girard.

Il s’y trouvait cinquante Turcs que Renouard confessa de son tinel ; il leur broya les membres à tous, tant qu’ils étaient. Puis descendant sous le pont, il y trouva Bertrand, les yeux bandés, les mains et les pieds chargés de chaînes. Peu s’en fallut qu’il ne l’eût tué aussi ; mais il se dit qu’il ne devait pas s’attaquer à un prisonnier. Il s’arrêta donc devant Bertrand et lui demanda :

— Ami, de quel pays êtes-vous ?

Bertrand, tout effrayé de son apparition, lui répondit :

— Je suis Français, seigneur, et neveu de Guillaume au court nez. Il y a quatre mois que les païens me firent