Page:Guillaume d’Orange, le marquis au court nez (trad. Jonckbloet).djvu/352

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
349

Les chevaliers descendent au perron du palais et se hâtent de monter en Gloriette, pâles de peur. Depuis une heure ils n’avaient sonné mot.

— Eh bien ! barons, avez-vous réussi ? M’avez-vous amené Renouard ?

— Pas du tout, monseigneur. Que cent diables l’emportent ! Peu s’en faut qu’il ne nous ait massacrés. Quand nous lui eûmes délivré votre message, il n’en fit pas plus de cas que d’un denier ; au contraire, il vous a menacé et injurié. Cela nous a mis en colère, et nous nous sommes jetés sur lui, pour le ramener de force ; mais il a arraché un poteau à une masure, avec laquelle il a couché par terre cinq d’entre nous ; nous ne savons s’ils sont morts ou blessés, car nous nous sommes sauvés. Il nous a crié qu’il voulait se battre avec vous.

À ces mots Guillaume sourit et demanda son cheval. Il se mit en route, suivi de cent chevaliers. Aymeric et tous ses fils montèrent à cheval avec lui et Guibor le suivit sur une mule splendidement caparaçonnée, — la selle était richement dorée, et le mors à lui seul valait une cité.

Ils firent tant qu’ils rejoignirent Renouard au moment où il entrait dans une barque. Mais ne sachant dresser le mât ni manier le gouvernail, il prit une perche qu’il enfonça dans l’eau avec tant d’impétuosité qu’il fit chavirer la barque. S’il n’avait su nager, il se serait noyé infailliblement. Quand il fut hors de l’eau, il dit :

— Du moment qu’un homme ne peut venir à bout d’une chose, c’est que les diables s’en mêlent. Si je ne puis aller par mer, j’irai par terre.

Il mit sa perche sur son épaule et s’achemina le long du rivage. Alors Guillaume s’adressa à lui en ces termes :

— Renouard, mon ami, laissez-moi vous parler. Si je vous ai mis en colère, je réparerai mes torts de la façon que vous exigerez.

— Laissez de côté vos sermons, répondit Renouard. Par