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aujourd’hui, jamais vous n’obtiendrez de moi la valeur d’un denier.

La ville est bien défendue. Les nombreux arbalétriers occupent la tour, des chevaliers bien armés galopent d’un point de la ville à l’autre, et aux portes se tiennent les bourgeois, à pied, armés de haches et couverts de targes rondes comme des fonds de tonneaux. Tous ils ont juré que si les lâches traîtres osent commencer l’attaque, ils mourront par milliers.

Malgré cela, sans plus attendre, les Sarrasins descendent dans les fossés et commencent à attaquer les murs à grands coups de pioche. Les défenseurs lancent sur leurs têtes des maillets de fer, de grands pieux pointus, des quartiers de rocher, des troncs d’arbres ; en un clin d’œil plus de mille assaillants furent tués. La terre était jonchée de morts.

— Mahomet ! au secours ! crièrent les païens ; si vous nous laissez mourir, vous vous tuez vous-même.

Thibaut, plein de rage, fit suspendre l’attaque, mais pour la recommencer bientôt. Les assaillants se retirent dans leur camp et commencent aussitôt à construire trente pierriers, et autant des mangonneaux.

Que Jésus maintenant vienne en aide aux bourgeois ! La garnison n’était pas à son aise ; on se soutenait en se disant :

— Souvenez-vous d’Aymeric à la barbe et de son fils Guillaume bras-de-fer, qui, quand il sera armé chevalier par le roi Charles, se hâtera de revenir ici ; il nous récompensera largement de notre fidélité ; il nous donnera de l’or et de l’argent, des draps précieux, des mulets et de bons chevaux d’Espagne.

Cependant Thibaut fait dresser un échafaudage en tête de sa ligne d’attaque, sur lequel, au son de trente trompettes, on place la statue de Mahomet, faite d’ivoire et du plus pur or d’Arabie, et grosse comme un tonneau de dix muids. Un homme y était caché, qui parla de la sorte :