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modière était un homme d’une grande droiture ; l’injustice, de quelque côté qu’elle vint, le révoltait. Prévoyant un conflit armé imminent entre les compagnies du Nord-Ouest et de la Baie d’Hudson, il décida en 1815 de porter un message à Lord Selkirk, qui demeurait à Montréal. Après avoir embrassé sa femme et ses enfants, il partit seul en hiver et fit au moins 1 500 milles à la raquette, traînant une toboggan. Lorsqu’il arriva à Montréal, il faisait nuit. Il frappa à la demeure de Lord Selkirk où l’on donnait grand bal. La porte s’ouvre, mais dès qu’on aperçoit cet étrange personnage, on s’apprête à le congédier. Lagimodière pousse violemment la porte et entre. Galants et soldats veulent lui barrer la route ; il les bouscule comme des enfants et présente son urgent message à Selkirk. Quelques jours après, Lord Selkirk demandait à Lagimodière quelle récompense il désirait pour le service qu’il venait de lui rendre. Lagimodière se contenta de prier le noble seigneur d’obtenir qu’on envoie des missionnaires dans l’Ouest, pour donner les secours de la religion à sa compagne, ainsi qu’à la population métisse qu’il aimait comme sa propre famille. Lord Selkirk, quoique protestant, fut vivement impressionné par la requête désintéressée du brave canadien. Il se rendit à Québec chez Mgr Plessis, l’unique évêque du Canada ; et cette intervention valut à l’Ouest canadien ses premiers missionnaires, les abbés Provencher et Dumoulin.

Auguste-Henri de TREMAUDAN, Hist. de la nation Métis, p. 98.

MASKOTEW
Maskotew (prairie) Cris, sauteux, otchipwé.
Racines ; maskochi : foin, herbe.

C’est le nom que les Métis de la Rivière-Rouge donnaient aux prairies de l’Ouest canadien. Ces prairies, en raison de leur immensité, ressemblent à des océans. Le firmament tombe autour de nous comme un globe tranché en deux. Des millions de bisons, cherchant leur subsistance, y avaient creusé des chemins tortueux, des fosses profondes que les labours ont fait disparaître. Les cours d’eau coulent paresseusement à cause du nivellement du sol. Quand les vents soufflent en tempête, et cela arrive assez fréquemment, ces prairies sont dangereuses comme un désert. En hiver, le froid devient intense, la poudrerie aveugle, le voyageur est sans abri et sans feu. L’été manque de verdure et d’ombre. Dans ces plaines monotones où les points

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