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Page:Guinault - Le numéro treize (1880).pdf/40

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LE NUMÉRO TREIZE

gens. Serre-le dans tes bras et mettons-le tout dans le fournil. Ah ! j’oubliais une chose !

— Une chose ?

— Oui, une botte de paille. Cela me fera gagner un mètre en hauteur, et c’est respectable. Allons ! c’est prêt, je suis content ! retourne tranquillement chez toi et ne dis rien. Surtout, je te le recommande, n’aie pas peur, quoiqu’il arrive ; un bon garçon comme toi qui travaille déjà comme un petit homme ne craint que de mal faire et il se moque des sorciers, des revenants et des contes bleus.

Tu dis peut-être que je ne devrais pas effrayer les autres. Mon garçon, écoute bien ! premièrement vu que depuis un bout de l’année jusqu’à l’autre, ils ne font que ça entre eux, c’est pain bénit ! ensuite, j’ai épuisé toutes mes raisons pour leur ouvrir l’entendement… à présent, je ne dirai plus rien ; mais, quand il se passera de mauvaises choses au pays, je ferai de la morale à ma façon.

J’aime quasiment mieux ça. Je suis las de toujours répéter les mêmes paroles. Ils en veulent des revenants et des maléfices, ils en auront. Peut-être qu’à la fin des fins, ils verront leur sottise. Bonsoir, garçon ! Je t’attends demain.

Je m’en retournai, les mains dans mes poches en sifflotant, pour n’avoir pas envie de causer en route.

Heureusement, la nuit tomba bientôt, je n’eus pas trop de peine à garder le secret, car une heure après le souper tout le monde était au lit.