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Page:Guinault - Le numéro treize (1880).pdf/45

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LE PÈRE LASCIENCE

de la lecon, raisonne, réfléchis et regarde de tous tes yeux le fond des choses, à seule fin de ne point prendre des vessies pour des lanternes.

— Je tâcherai, parrain.

Le lendemain, comme j’étais aux champs à garder mes bêtes, j’aperçus Mathurine qui s’avançait un panier au bras, sa serpe à la main, ramassant de l’herbe pour ses lapins. Quand je fus à portée de l’entendre, elle me cria :

— Tu n’as donc pas peur, toi, garcon, que tu es là tout seul tranquillement ?

— Mais non ! je ne suis pas seul, vous voyez bien que je suis en compagnie : mon chien et mes bêtes à cornes.

Elle s’approcha de moi et s’assit au bord de la route.

— Viens un peu ici que je te parle, petit. Ah ! ça, dis moi, où as-tu été hier ?

— Où j’ai été ? Ça dépend de l’heure.

— À douze heures de nuit… au sabbat, pas vrai ? avec ton parrain…

Je fus pris d’une folle envie de rire.

— Non, Mathurine, pas avec mon parrain… vous ne vous souvenez donc pas ?

Elle me regarda d’un œil inquiet et interrogatif. Avec vous, Mathurine…

Elle eut un soubresaut d’horreur.

Sur la place… même vous aviez dans les mains un manche à balai et sa suite, et un déshabillé comme on n’en voit quasiment qu’à…

Je partis d’un éclat de rire.