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Page:Guindon - En Mocassins, 1920.djvu/135

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le génie du lac des deux-montagnes

Le chant d’Oka.

 « Esprits de la nature, ô peuple magnifique,
Écoutez-moi : pour vous ma bouche va s’ouvrir.
L’ancien temps a passé comme un poème épique
Qu’on chante… Berçons-nous de son grand souvenir ! »

« Orage tout-puissant, toi qui courbes les cimes
Des cèdres et des pins, toi qui creuses les eaux,
Qui ternis leur cristal, devant nous, tes intimes,
Laisse tomber du ciel tes ruisselants rideaux. »

« Cache-nous dans tes plis, sympathique tempête,
Loin des yeux indiscrets, loin des lieux profanés ;
Entoure cet îlot, notre arène de fête,
Car nous sommes du lac les bardes premiers-nés. »

Ô lac ! Je ne vois plus les ombres tutélaires
Sur tes rives tomber de mille arceaux feuillus ;
On t’a donc enlevé tes forêts séculaires,
La pourpre des vieux troncs et leurs bras chevelus. »

« Tristes et secouant leurs pendantes ramures,
Les rares survivants de ces bois enchantés,
Semblent crier vengeance en montrant leurs blessures…
Le cyclone et le temps les avaient respectés ! »

« Sur ces coteaux, séjours de l’ombre et du silence,
L’Indien qui de peu fait son toit, son foyer,
D’abattre ces vieillards n’avait pas l’insolence :
Leur branches librement se pouvaient déployer. »