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le génie du lac des deux-montagnes



« Mais à quoi bon du sort accuser l’imposture :
Qui pourrait arrêter en sa course le temps ?
Souriez au destin, enfants de la nature :
Aux bardes immortels tout parle de printemps. »

« Le plaisir des esprits ne peut être éphémère :
À son heure il revient avec les ouragans.
Oh ! c’est que la nature est notre bonne mère,
Et que nos frères sont l’orage et les autans. »

« Ô lac, nous t’avons vus jadis en ta jeunesse,
Lorsque des Indiens tu portais les canots ;
Nous te voyons encore aux jours de ta vieillesse :
Tes bords seuls ont changé ; ce sont les mêmes flots. »

« En vain, fouillant le sol, l’intrus Visage-Pâle
Voudrait de leurs séjours chasser les manitous ;
De tes vagues ses nefs souillent en vain l’opale :
Rien ne peut empêcher nos divins rendez-vous. »

« Le fond de notre lac a gardé ses mystères :
Quand le soleil couchant y baigne ses cheveux,
Il voit, de son œil d’or, nos retraites austères
Se creuser sous les flots qu’il crête de ses feux. »

« Et l’astre que la nuit allume dans sa voûte,
Qu’elle couvre d’un voile à bordure d’argent,
C’est encore un ami qui, là-haut, nous écoute,
Et dont, au besoin, l’ombre ou le rayon descend. »