Page:Guizot - Collection des mémoires relatifs à l'histoire de France, 1823.djvu/343

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haute voix, appela par son nom Léger, comme si l’évêque s’était enfui au bruit déjà répandu qu’il voulait le frapper du glaive. Lorsque, à force de crier, le roi eut appris que l’évêque était dans le baptistère, il y entra aussi, et resta stupéfait de l’éclat des lumières, de l’odeur du saint chrême, et de toutes les choses qui servent à la sanctification des baptisés. Mais quand Léger eut répondu à ses clameurs : « Me voici, » le roi ne le reconnut en aucune façon, passa outre, et s’assit dans la maison épiscopale qui lui avait été préparée. Les autres évêques qui avaient célébré les Vigiles avec l’homme de Dieu, retournèrent dans leur logis. Mais lui, après avoir achevé le saint office, alla au roi avec intrépidité, et, sans craindre sa colère, lui demanda avec de douces paroles pourquoi il n’était pas venu avant Vigiles, et comment, pendant les solennités de cette sainte nuit, il pouvait persister à être si irrité. Childéric, troublé, ne sut que répondre à son ineffable sagesse, si ce n’est que, pour une certaine cause, Léger lui était suspect. L’homme de Dieu vit donc que, poussé par ses satellites, le roi avait résolu de le mettre à mort lui et Victor, et que Victor, plein d’effroi, craignait la fureur du roi. Il ne trembla point pour sa propre vie, mais voulut assurer le salut de ceux qui étaient venus réclamer sa protection, et aima mieux fuir et se cacher, que de fournir l’occasion d’ensanglanter, par son martyre, les solennités de la résurrection du Seigneur. Il ne pouvait supporter non plus que ceux qui s’étaient rendus près de lui perdissent si malheureusement la vie. Que personne ne l’accuse d’avoir craint le martyre, car précédemment, averti par un