Page:Guizot - Collection des mémoires relatifs à l'histoire de France, 1823.djvu/358

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monastères de femmes nobles, envoya les premières d’entre elles en exil ; et investi du pouvoir de fouler aux pieds les perles de la couronne royale, il ne craignit pas, comme un pourceau, d’insulter au Christ, en foulant aux pieds sans pitié les ornemens de ses églises. Hors d’état d’élever ses yeux vers le ciel, il tint son cœur absolument plongé dans la fange des passions terrestres.

Après avoir ainsi assouvi sa fureur, ce cruel commença à chercher quelque moyen de soustraire ses crimes aux regards des hommes. Il feignit de vouloir venger la mort de Childéric, tandis que personne plus que lui ne l’avait voulue ; mais il n’osait pas poursuivre hautement celui qu’il haïssait.

Les grands ordonnèrent que Léger fût tiré, ainsi que son frère, du monastère où il se tenait caché, et qu’on les amenât en présence du roi. Léger se tournant vers Ébroin, lui dit : « En t’efforçant d’opprimer tous les habitants de toute la France, tu perds le haut rang que tu as obtenu sans le mériter. » À ces mots, le scélérat Ébroin, plein de fureur, ordonna que Guérin, frère de Léger, fût jeté hors des portes, et séparé de lui, afin qu’ils fussent punis séparément, et ne se pussent consoler en disant de telles paroles. Comme on l’emmenait, le bienheureux Léger parla à son frère, lui disant : « Sois calme, frère très chéri, il faut que nous souffrions tout cela, et les maux de cette vie ne sont rien auprès de l’éternelle gloire qui nous est réservée ; nos péchés sont grands, mais la miséricorde du Très-Haut les surpasse, et elle est toujours prête à laver les péchés de ceux qui publient ses louanges. Souffrons