Page:Guizot - Collection des mémoires relatifs à l'histoire de France, 1823.djvu/368

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posait son corps. Le prêtre de l’église atteste tout cela. Une nuit, un clerc serviteur de ce prêtre, et gardien de l’église, essuya un vol. Tout ce qu’il possédait lui fut enlevé par les larrons, et même le voleur emporta sans le savoir la chaussure du bienheureux martyr que le clerc gardait par respect. Celui-ci quittant de bonne heure l’oratoire, et rentrant chez lui, trouva enlevés tous ses effets. Il se rendit en hâte au sépulcre du saint, et le pria de lui faire rendre ce qu’il avait perdu. Il passa tout le jour et toute la nuit en prières et en jeûnes au tombeau du saint, toujours continuant de psalmodier. Son oraison finie, il retourna à sa cellule, et y retrouva, sans qu’il y manquât rien, ce qu’il avait perdu, et la chaussure du martyr. Le maître du voleur, qui avait juré par serment que son esclave n’avait point fait ce crime, de retour chez lui, finit sa vie ; le crime de l’esclave ne lui tourna pas non plus à bien.

De plus en plus se répandit au loin la renommée de la sainteté du martyr, et Ébroin en fut bientôt instruit. Il envoya en secret quelqu’un pour s’informer de toutes ces choses et lui dire la vérité. L’envoyé obéit à ses ordres, alla jusqu’au tombeau, et interrogeant les gardes, apprit où reposait Léger. Un aveugle qui avait recouvré la vue par la puissance du saint de Dieu et s’était dévoué à son service, lui dit où était enseveli le corps, et quels miracles il opérait ; mais l’envoyé ne crut point cet homme ; lui-même, gonflé d’orgueil, il s’approcha du tombeau, et ne se courba point pour prier ; de plus, plein de mépris, il frappa la terre de son pied, et parla follement, car il ne connaissait pas la puissance de Léger. « Un mort, dit-il,