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LIVRE DIXIÈME



La quinzième année du roi Childebert[1], notre diacre revenant de la ville de Rome avec des reliques de saints, rapporta qu’au neuvième mois de l’année précédente, le fleuve du Tibre avait couvert la ville de Rome d’une telle inondation que les édifices antiques en avaient été renversés, et les greniers de l’État emportés ; on y perdit plusieurs milliers de mesures de grainsi. Il arriva aussi qu’une multitude de serpens et un grand dragon semblable à une grosse solive, descendirent à la mer entraînés par les eaux du fleuve ; mais ces animaux étouffés dans les flots orageux de la mer salée, furent rejetés sur le rivage. Aussitôt après survint une contagion qu’ils appellent maladie des aines[2] ii. Elle arriva vers le milieu du onzième mois, et selon ce qu’on lit dans le prophète Ézéchiel : « Commencez par mon sanctuaire[3], » elle frappa d’abord le pape Pélage, qui en mourut presque aussitôtiii. Après sa mort la maladie causa de grands ravages parmi les habitants ; et comme l’Église de Dieu ne pouvait demeurer sans chef, tout le peuple élut le diacre Grégoire[4] iv. Il était sorti d’une des premières familles de

  1. En 590.
  2. Espèce de maladie contagieuse qui n’est nulle part définie, mais qu’on peut regarder comme une des nombreuses sortes de peste si souvent confondues sous le même nom.
  3. Ézéch. chap. 9, v. 6.
  4. Grégoire Ier, dit le Grand, qui occupa le trône pontifical du 3 septembre 590 au 12 mars 604.