Page:Guizot - Collection des mémoires relatifs à l'histoire de France, Tome 1, 1823.djvu/426

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invité avec Eberulf et d’autres citoyens à un repas dans la sainte basilique, et là Claude l’eût frappé de son épée si ses serviteurs eussent été plus éloignés de lui. Cependant Eberulf, imprudent et vain, ne s’en aperçut point ; lorsque le repas fut fini, Eberulf et Claude se promenèrent dans le vestibule de la maison épiscopale, se promettant tour à tour, et avec des sermons réciproques, amitié et fidélité. Dans cette conversation Claude dit à Eberulf  : « Il me plairait de boire un coup dans ton logis si nous avions des vins parfumés, ou si ta générosité faisait venir des vins plus forts. » Eberulf ravi répondit qu’il en avait disant : « Tu trouveras dans mon logis tout ce que tu voudras ; que mon Seigneur daigne seulement entrer dans ma chétive demeure. » Il envoya ses serviteurs l’un après l’autre chercher des vins plus forts, des vins de Latakié xxiv et de Gaza. Claude, le voyant seul et sans ses gens, éleva la main contre la basilique et dit : « Bienheureux Martin, faites que je revoie bientôt ma femme et mes parens ; » car le malheureux était placé dans une cruelle alternative, il méditait de tuer Eberulf dans le vestibule, et craignait le pouvoir du saint évêque. Alors un des serviteurs de Claude qui était plus robuste, saisit Eberulf par derrière, le serra fortement dans ses bras, et l’ayant renversé le livra, la poitrine découverte, aux coups du meurtrier. Claude ayant dégainé son épée la dirigea contre lui. Mais Eberulf, quoique retenu, tira de sa ceinture un poignard et se tint prêt à frapper. Au moment où Claude, la main levée, lui enfonçait son fer dans le sein, Eberulf lui plongea vigoureusement son poignard sous l’aisselle, et, en le retirant, lui coupa le pouce d’un nouveau