Page:Guizot - Histoire générale de la civilisation en Europe, 1838.djvu/127

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un progrès nouveau, c’est un grand pas dans la connaissance et vers l’empire de la vérité ; pourvu toutefois que nous ne nous laissions pas envahir, entraîner par cette disposition ; pourvu que nous n’oubliions pas que la vérité seule a droit de régner sur le monde ; que les faits n’ont de mérite qu’autant qu’ils l’expriment et tendent à s’y assimiler de plus en plus ; que toute vraie grandeur vient de la pensée ; que toute fécondité lui appartient. La civilisation de notre patrie, Messieurs, a ce caractère particulier, qu’elle n’a jamais manqué de grandeur intellectuelle ; elle a toujours été riche en idées ; la puissance de l’esprit humain a été grande dans la société française, plus grande peut-être que partout ailleurs. Il ne faut pas qu’elle perde ce beau privilège, il ne faut pas qu’elle tombe dans cet état un peu subalterne, un peu matériel, qui caractérise d’autres sociétés. Il faut que l’intelligence, les doctrines, tiennent aujourd’hui en France au moins la place qu’elles y ont occupée jusqu’à présent.

Nous n’éviterons donc nullement les questions générales et philosophiques, nous n’irons pas les chercher, mais quand les faits nous y amèneront, nous les aborderons sans hésitation, sans embarras. L’occasion s’en présentera plus d’une fois, en considérant le régime féodal dans ses rapports avec l’histoire de la civilisation européenne.

Une bonne preuve, Messieurs, qu’au dixième siècle, le régime féodal était nécessaire, et le seul état social possible, c’est l’universalité de son établissement. Partout où cessa la barbarie, tout prit la forme féodale. Au premier moment, les hommes n’y virent