Page:Guizot - Histoire générale de la civilisation en Europe, 1838.djvu/170

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le respect de la liberté, celui de l’Église laissait beaucoup à désirer.

Deux mauvais principes s’y rencontraient : l’un avoué, incorporé pour ainsi dire dans les doctrines de l’Église ; l’autre introduit dans son sein par la faiblesse humaine, nullement par une conséquence légitime des doctrines.

Le premier c’était la dégénération des droits de la raison individuelle, la prétention de transmettre les croyances de haut en bas dans toute la société religieuse, sans que personne eût le droit de les débattre pour son compte. Il est plus aisé de poser en principe cette prétention que de la faire réellement prévaloir. Une conviction n’entre point dans l’intelligence humaine, si l’intelligence ne lui ouvre la porte ; il faut qu’elle se fasse accepter. De quelque manière qu’elle se présente, quel que soit le nom qu’elle invoque, la raison y regarde, et si elle pénètre, c’est qu’elle est acceptée. Ainsi, il y a toujours, sous quelque forme qu’on la cache, action de raison individuelle sur les idées qu’on prétend lui imposer. Il est très-vrai cependant que la raison peut être altérée ; elle peut, jusqu’à un certain point, s’abdiquer, se mutiler ; on peut l’induire à faire un mauvais usage de ses facultés, à n’en pas faire tout l’usage qu’elle a le droit d’en faire. Telle a été en effet la conséquence du mauvais principe admis par l’Église ; mais quant à l’action pure et complète de ce principe, elle n’a jamais eu lieu, elle n’a jamais pu avoir lieu.

Le second mauvais principe, c’est le droit de coaction que s’arrogeait l’Église, droit contraire à la nature de la société religieuse, à l’origine de l’Église