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Page:Guizot - Histoire générale de la civilisation en Europe, 1838.djvu/198

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se mettait à couvert sous le pouvoir absolu des empereurs ; forte, elle le revendiquait pour son propre compte, au nom de son pouvoir spirituel. Il ne faut pas s’arrêter à quelques faits, à certains cas particuliers. Sans doute l’Église a souvent invoqué les droits des peuples contre le mauvais gouvernement des souverains ; souvent même elle a approuvé et provoqué l’insurrection. Souvent aussi elle a soutenu auprès des souverains les droits et les intérêts des peuples. Mais quand la question des garanties politiques s’est posée entre le pouvoir et la liberté, quand il s’est agi d’établir un système d’institutions permanentes, qui missent véritablement la liberté à l’abri des invasions du pouvoir, en général, l’Église s’est rangée du côté du despotisme.

Il ne faut pas trop s’en étonner, ni s’en prendre trop à la faiblesse humaine dans le clergé, ou à quelque vice particulier de l’Église chrétienne. Il y en a une cause plus profonde et plus puissante.

A quoi prétend une religion, Messieurs, quelle qu’elle soit ? elle prétend à gouverner les passions humaines, la volonté humaine. Toute religion est un frein, un pouvoir, un gouvernement. Elle vient au nom de la loi divine, pour dompter la nature humaine. C’est donc à la liberté humaine qu’elle a surtout affaire. C’est la liberté humaine qui lui résiste, et qu’elle veut vaincre. Telle est l’entreprise de la religion, sa mission, son espoir.

A la vérité, en même temps que c’est à la liberté humaine que les religions ont affaire, en même temps qu’elles aspirent à réformer la volonté de l’homme, elles n’ont, pour agir sur l’homme, d’autre moyen