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Page:Guizot - Histoire générale de la civilisation en Europe, 1838.djvu/244

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purement religieuse, ses rapports avec la société civile, le principe théocratique, la séparation du pouvoir spirituel et du pouvoir temporel, les premiers cours de la persécution, les premiers cris de la liberté de conscience. Les communes naissantes vous ont laissé entrevoir une association fondée sur de tout autres principes que ceux de la féodalité ou de l’Église, la diversité des classes sociales, leurs luttes, les premiers et profonds caractères des mœurs bourgeoises modernes, la timidité d’esprit à côté de l’énergie de l’âme, l’esprit démagogique à côté de l’esprit légal. Tous les éléments en un mot qui ont concouru à la formation de la société européenne, tout ce qu’elle a été, tout ce dont elle a parlé, pour ainsi dire, ont déjà frappé vos regards.

Transportons-nous cependant, Messieurs, au sein de l’Europe moderne ; je ne dis pas même de l’Europe actuelle, après la prodigieuse métamorphose dont nous avons été témoins, mais dans les 17e et 18e siècles. Je vous le demande ; reconnaîtrez-vous la société que nous venons de voir au douzième ? Quelle immense différence ! J’ai déjà insisté sur cette différence par rapport aux communes : je me suis appliqué à vous faire sentir combien le tiers-état du dix-huitième siècle ressemblait peu à celui du douzième. Faites le même essai sur la féodalité et sur l’église ; vous serez frappés de la même métamorphose. Il n’y avait pas plus de ressemblance entre la noblesse de la cour de Louis XV et l’aristocratie féodale, entre l’église du cardinal de Bernis et celle de l’abbé Suger, qu’entre le tiers-état du dix-huitième siècle et la bourgeoisie du douzième. Entre ces deux époques, quoique déjà en possession