Page:Guizot - Histoire générale de la civilisation en Europe, 1838.djvu/275

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de droit, c’est la royauté qui les reproduit extérieurement sous la forme la plus sensible, qui en paraît la plus fidèle image. Ouvrez l’ouvrage où M. Benjamin Constant a si ingénieusement représenté la royauté comme un pouvoir neutre, un pouvoir modérateur, élevé au-dessus des accidents, des luttes de la société, et n’intervenant que dans les grandes crises. N’est-ce pas là, pour ainsi dire, l’attitude du souverain de droit dans le gouvernement des choses humaines ? Il faut qu’il y ait dans cette idée quelque chose de très propre à frapper les esprits, car elle a passé avec une rapidité singulière des livres dans les faits. Un souverain en a fait, dans la constitution du Brésil, la base même de son trône ; la royauté y est représentée comme pouvoir modérateur, élevé au-dessus des pouvoirs actifs, comme spectateur et juge.

Sous quelque point de vue que vous considériez l’institution, en la comparant au souverain de droit, vous trouverez que la ressemblance extérieure est grande, et qu’il est naturel qu’elle ait frappé l’esprit des hommes. Aussi toutes les fois que leur réflexion ou leur imagination se sont tournées de préférence vers la contemplation ou l’étude de la nature du souverain de droit, de ses caractères essentiels, ils ont incliné vers la royauté ; ainsi dans les temps de prépondérance des idées religieuses, la contemplation habituelle de la nature de Dieu a poussé les hommes vers le système monarchique. De même, quand les jurisconsultes ont dominé dans la société, l’habitude d’étudier, sous le nom de loi, la nature du souverain de droit, a été favorable au dogme de sa personnification