Page:Guizot - Histoire générale de la civilisation en Europe, 1838.djvu/288

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C’est là la véritable origine de la royauté moderne ; c’est là son principe vital, pour ainsi parler, celui qui s’est développé dans le cours de sa carrière, et, je n’hésite pas à le dire, qui a fait sa fortune. On voit reparaître, aux différentes époques de l’histoire, les différents caractères de la royauté ; on voit les royautés diverses que j’ai décrites essayant tour à tour de reprendre la prépondérance. Ainsi le clergé a toujours prêché la royauté religieuse ; les jurisconsultes ont travaillé à ressusciter la royauté impériale ; les gentilshommes auraient quelquefois voulu renouveler la royauté élective, ou maintenir la royauté féodale. Et non seulement le clergé, les jurisconsultes, la noblesse ont tenté de faire dominer dans la royauté tel ou tel caractère ; elle-même les a tous fait servir à l’agrandissement de son pouvoir ; les rois se sont présentés tantôt comme les délégués de Dieu, tantôt comme les héritiers des empereurs, ou comme les premiers gentilshommes du pays, selon le besoin ou le penchant du moment ; ils se sont illégitimement prévalus de ces titres divers, mais ni l’un ni l’autre n’a été le titre véritable de la royauté moderne, la source de son influence prépondérante. C’est, je le répète, comme dépositaire et protectrice de l’ordre public, de la justice générale, de l’intérêt commun, c’est sous les traits d’une grande magistrature, centre et lien de la société, qu’elle s’est montrée aux yeux des peuples et s’est approprié leur force en obtenant leur adhésion.

Vous verrez, à mesure que nous avancerons, ce caractère de la royauté européenne moderne, qui commence, je le répète, au douzième siècle, sous le