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Page:Guizot - Histoire générale de la civilisation en Europe, 1838.djvu/356

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l’a point introduite ; elle a plutôt fortifié qu’affaibli le pouvoir des princes ; elle a été plus contraire aux institutions libres du moyen-âge que favorable à leur développement. Cependant elle a suscité et entretenu en Allemagne une liberté de la pensée plus grande peut-être que partout ailleurs. En Danemarck, dans un pays où domine le pouvoir absolu, où il pénètre dans les institutions municipales, aussi bien que dans les institutions générales de l’État, là aussi, par l’influence de la Réforme, la pensée s’est affranchie et s’exerce librement dans toutes les carrières. En Hollande, au milieu d’une république ; en Angleterre, sous la monarchie constitutionnelle, et malgré une tyrannie religieuse longtemps très-dure, l’émancipation de l’esprit humain s’est également accomplie. Enfin, en France, dans la situation qui semblait la moins favorable aux effets de la révolution religieuse, dans un pays où elle a été vaincue, là même elle a été un principe d’indépendance et de liberté intellectuelle. Jusqu’en 1685, c’est-à-dire jusqu’à la révocation de l’édit de Nantes, la Réforme a obtenu en France une existence légale. Pendant ce long espace de temps elle a écrit, elle a discuté, elle a provoqué ses adversaires à écrire, à discuter avec elle. Ce seul fait, cette guerre de pamphlets, de conférences, entre les anciennes et les nouvelles opinions, a répandu en France une liberté beaucoup plus réelle, beaucoup plus active qu’on ne le croit communément ; liberté qui a tourné au profit de la science, de la moralité, de l’honneur du clergé français, aussi bien qu’au profit de la pensée en général. Jetez les yeux, Messieurs, sur les