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Page:Guizot - Histoire générale de la civilisation en Europe, 1838.djvu/357

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conférences de Bossuet avec Claude, sur toute la polémique religieuse de cette époque, et demandez vous si Louis XIV eût supporté, sur toute autre matière, un pareil degré de liberté. C’est entre la réforme et le parti opposé qu’il y a eu le plus de liberté en France dans le dix-septième siècle. La pensée religieuse a été alors bien plus hardie, elle a traité les questions avec plus de franchise que la pensée politique de Fénélon lui-même dans le Telémaque. Cet état n’a cessé qu’à la révocation de l’édit de Nantes. Or, de 1685 à l’explosion de l’esprit humain au dix-huitième siècle, il n’y a pas quarante ans ; et l’influence de la révolution religieuse en faveur de la liberté intellectuelle venait à peine de cesser quand celle de la révolution philosophique a commencé.

Vous le voyez, Messieurs, partout où la Réforme a pénétré, partout où elle a joué un grand rôle, victorieuse ou vaincue, elle a eu pour résultat général, dominant, constant, un immense progrès dans l’activité et la liberté de la pensée, vers l’émancipation de l’esprit humain.

Et non-seulement la Réforme a eu ce résultat, mais elle s’en est contentée ; là où elle l’a obtenu, elle n’en a guère cherché d’autre, tant c’était là le fond même de l’événement, son caractère primitif et fondamental ! Ainsi en Allemagne, loin de demander la liberté politique, elle a accepté, je ne voudrais pas dire la servitude politique, mais l’absence de la liberté. En Angleterre, elle a consenti la constitution hiérarchique du clergé, et la présence d’une église aussi abusive que l’ait jamais été l’Église romaine, et beaucoup plus servile. Pourquoi la Réforme, si passionnée, si roide,